19 euros
Editions Stock
Résumé :
Nadia Guerra est une jeune femme qui se bat contre l'oubli et l'immobilisme. Animatrice de radio, elle se fait le porte-parole d'une Cuba de l'ombre, sensuelle et rebelle. Elle obtient une bourse pour Paris. Elle quitte son île, son père, pour se rendre dans la Ville Lumière, lieu de tous ses fantasmes. Mais l'art n'est pas sa seule motivation : elle part aussi pour revoir sa mère, Albis Torres, qui l'a abandonnée alors qu'elle n'avait que 10 ans pour fuir à l'autre bout du monde. Elle va finalement la rattraper à Moscou. Mariée. Mais sans mémoire de sa vie passée, présente et future. Alzheimer. Refusant de la laisser là, perdue et désorientée, Nadia va la ramener dans son pays natal. En fouillant dans ses affaires, elle va retrouver, perdu parmi les livres interdits, le journal que cette femme tenait à Cuba à la veille de laRévolution. Elle donne ainsi à entendre le son de cette époque déterminante et y dresse notamment le portrait de Celia Sanchez, cette héroïne révolutionnaire qui fut la première épouse de Castro.
Avis et Critiques :
Cubaine comme son héroïne, Wendy Guerra partage avec elle son patronyme martial et son ascendant prestigieux. Cette parenté, trop assumée pour laisser le doute sur l'aspect autobiographique du roman, donne un indice sur les intentions de l'oeuvre : faire oublier le temps de l'écriture pour coller aux flancs de la réalité. Envoûtant, le premier chapitre donne le ton. Interpellé par la voix de la narratrice, le lecteur est sommé d'écouter "ce que je vous raconte aujourd'hui... en direct, protégée par le demi jour de cette cabine hermétique". Expérience étrange que celle de lire les mots livrés au microphone et les couplets écrits pour être chantés, et belle célébration du pouvoir de l'imagination. Bravant la censure, Nadia (ou bien est-ce Wendy) offre une voix à la jeunesse écrasée par des années d'héroïsme révolutionnaire. Déchiré entre la nostalgie d'un âge d'or du combat et la volonté d'évacuer la culpabilité des héritiers, le personnage n'a de cesse de payer son tribu aux grands noms, Celia Sanchez en tête. Ce balancier entre passé et présent crie la trahison de l'idéal : l'intelligentsia a fui, les dissidents sont muselés, le pays se morfond. Pour traduire ce va-et-vient, la multiplication des focalisations et des formes (journal, lettre...), quoique judicieux, rend l'ensemble parfois bancal. Un peu trop d'affectation, des échos en fin de phrases qui manquent leur effet poétique, le texte pourra, de plus, agacer par son maniérisme. Qu’importe, le style, exalté, fait oublier ses afféteries. Impétueux, 'Mère Cuba' rayonne par sa faculté à traduire la foi en l'art et en la vie d'une génération lasse mais amoureuse de sa culture. Et déterminée à la préserver.
Par Aurélie Mongourt
(Source : Evene)
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