jeudi 1 octobre 2009

Lucia Etxebarria - Espagnole.



Lucia Etxebarria est la benjamine d'une famille de sept enfants. Inscrite dans un collège religieux à Valence, elle s'établit par la suite à Madrid. Jusqu'à l'âge de ses 18 ans, elle enchaîne les petits jobs : elle travaille dans une maison de disques, fait de la traduction, etc. Après avoir obtenu son diplôme de journaliste, elle commence par écrire une biographie de Kurt Cobain et Courtney Love en 1996. Elle publie ensuite 'Amour, Prozac et autres curiosités', qui devient très vite un best-seller. Elle publie par la suite trois romans, "Beatriz et les corps celestes"-Prix Nadal en 1998 - " De l"amour et autres mensonges" - Prix Primavera, 2001 - "Un miracle en équilibre" - Prix Planeta, 2004 - et un recueil de nouvelles "Aime moi, por favor !". Amoureuse de Madrid, elle en explore toutes les facettes à pieds, vole de cinémas alternatifs en théâtres d'avant-garde, de night-clubs en concerts de musique classique... La ville est d'ailleurs le lieu de son roman "Cosmofobia", comédie humaine madrilène sortie en 2007. Longtemps rebelle, Lucia Etxebarria déchiffre le monde d'aujourd'hui et lutte pour les droits de la femme .

Maman à 41 ans, l’écrivain sexe, drogue et rock’n’roll espagnole, conserve de sa jeunesse révoltée, un grain de folie et une rébellion devenue rage de vivre. On aurait pu la croire rangée avec sa petite famille mais elle poursuit toujours ses idéaux féministes.

Dans le salon, je m'assieds sur l'imposant canapé, sous la protection de peintures et de posters soigneusement désalignés sur le mur jaune. La petite fille, aussi blonde que Lucia est brune, court du balcon à sa chambre et de sa chambre au balcon. « Elle veut juste attirer l'attention, ne t'inquiète pas. Elle n'aime pas que je ne sois pas toute à elle ». Sait-elle pourquoi sa mère répond à des interviews ? « Non, je ne lui ai pas expliqué mon métier. Pour elle je suis une maman normale. Je vais la chercher normalement à l'école et je lui raconte normalement des histoires pour l'endormir. »


Une maman normale qui a débuté sa carrière littéraire par une biographie de Kurt Cobain et Courtney Love, le couple rock mythique, des années 90. Son premier roman Amor, curiosidad, prozac y dudas est sur la pile des meilleurs ventes et en tête des gondoles des grandes librairies, avec sa traduction française Amour, Prozac et autres curiosités (Editions 10/18, sorti en 1997)… ou une plongée dans un univers madrilène pop et déjanté.


Comme elle s'exprime dans un français parfait, je lui dis que ses traductions en français ne lui rendent pas justice et demande si, à l'instar d'Umberto Eco, elle exige un droit de regard sur les traductions de ses livres. Elle éclate de rire. « Je n'ai pas le temps. D'ailleurs même si j'avais le temps, je n'aurais pas envie, j'ai d'autres choses à faire. Il n'y a pas que mes livres dans la vie. Vois-tu, la différence entre Umberto Eco et moi, c'est que moi j'écris sur la réalité, il faut bien que je m'y frotte. » Elle s'anime : « Umberto Eco est indéniablement un grand écrivain mais lui n'élève pas une petite fille turbulente. As-tu vu le film Comme une image de Jaoui et Bacri ? Il y a un écrivain homme qui ne sait se consacrer qu'à son art dedans. C'est un film très juste.


« Ca se passe toujours comme ça, ça s'est toujours passé comme ça. Les hommes artistes sont des artistes, les femmes artistes sont des femmes. La littérature est un art encore plus machiste que les autres. Il y a une frontière entre la littérature des sentiments et la littérature virile, digne d'intérêt. Les hommes écrivains sont très à cheval sur leur virilité, il ne faut pas vendre plus de livres qu'eux, sinon on les menace ». Elle s'amuse maintenant franchement : « Moi, je vends pas mal et en prime, je n'ai pas ma langue dans la poche, du coup je suis cataloguée lesbienne ou à la rigueur, dans le meilleur des cas, castratrice. »

La France est un pays plus moderne que l'Espagne. A mon tour, je ris et affirme que peu de pays européens sont plus rétrogrades que le mien. « Tu dis ça parce que l'Espagne a le mariage gay. Vous, les Français, vous croyez que l'Espagne est un pays moderne parce que vous voyez Lucia Etxebarria et Pedro Almodovar. D'abord, on a tous les deux, presque plus de succès chez vous qu'ici. Et puis c'est vous qui avez un bon système de congés parentaux par exemple. » Je réplique que la réaction du parti socialiste à la candidature de Ségolène Royal n'a pas été des plus progressistes. « Mais au moins il y a eu une réaction. Ici, ils l'auraient tellement peu prise au sérieux qu'ils ne se seraient même pas donné la peine de réagir. » Alors, pourquoi vivre en Espagne ? « Madrid, ce n'est pas l'Espagne tu sais et puis ce n'est pas moi qui ai choisi cette ville, c'est elle qui m'a choisie. »


Bibliographie
Ce que les hommes ne savent pas, 2009
Je ne souffrirai plus par amour, 2008
Cosmofobia, 2007
Un miracle en équilibre, 2007
Aime moi, por favor, 2006
De l'amour et autres mensonges, 2004

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